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Quels métaux dans les smartphones ?

Auteurs et date
  • Date de production de la fiche : 08/06/2021
  • Françoise Berthoud : ingénieure de recherche en informatique au CNRS, EcoInfo

Des métaux dans les smartphones, pour quoi faire1 ?

En 1950, on dénombrait une douzaine de métaux dans nos bons vieux téléphones fixes. Dans les années 1990, les GSM, loin de rentrer dans nos poches, comportaient une petite trentaine de métaux. Le smartphone d'aujourd'hui, beaucoup plus petit et fin, contient plus de 50 métaux : une condition pour avoir toutes les fonctionnalités de nos équipements !

Quelques exemples :

De l'Indium et de l'étain sont nécessaires à la fabrication de nos écrans pour transformer l'effleurement de notre index en « clic ». En effet ces écrans dits capacitifs sont revêtus d'un film qui conduit l'électricité tout en étant transparent et c'est un oxyde d'indium-étain qui permet cette prouesse technologique.

Quant aux LED, elles contiennent de base un composé de gallium (extrait du minerai d'aluminium) et d'au moins un autre atome, qui va déterminer la couleur « de base » de la LED. Ainsi, de l'arsenic combiné à du phosphore va donner une lumière rouge orangé, alors qu'avec de l'azote ou de l'indium, la LED apparaît bleue. Mais les concepteurs de LED ont imaginé pouvoir faire des couleurs plus belles et plus variées, jaune, blanc, rouge, bleu ou vert. Alors sont utilisés différents cocktails de terres rares aux noms mystérieux : grenat d'yttrium et d'aluminium, cérium, yttrium, europium ou terbium. On peut aussi retrouver du lanthane et du gadolinium.

Focus sur les Terres Rares

Improprement appelées terres rares, les lanthanides sont en fait aussi abondants que d'autres métaux comme le nickel ou le cuivre et donc plus abondants que l'or et l'argent mais beaucoup plus dispersés : ils s'appellent cérium, europium, gadolinium, lanthane, néodyme, praséodyme, prométhium, samarium et scandium, dysprosium, terbium, holmium, lutécium, terbium, thulium, ytterbium et yttrium.

On retrouve ces métaux sous forme de traces dans la plupart des environnements naturels. Leurs propriétés électroniques, magnétiques, optiques ou encore catalytiques, en font des éléments particulièrement recherchés par l'industrie (aéronautique, automobile, technologies de personnes en situation de handicap, etc.).

Les méthodes d'extraction et de séparation de ces métaux font appel à des procédés complexes et très polluants : rejets d'acides, de bases, de solvants, de métaux lourds ou de déchets radioactifs2. En plus, ces processus requièrent de grandes quantités d'eau.

Les éléments des terres rares (ETR) sont utilisés dans de nombreuses applications industrielles : l'électronique, l'énergie propre, l'aérospatial, l'automobile et la défense et d'autres.

Par exemple, la fabrication d'aimants représentait en 2019 la plus grande et la plus importante utilisation finale des ETR, soit 38 % de la demande prévue. Les aimants sont utilisés dans les smartphones, les téléviseurs, les ordinateurs, les automobiles, les éoliennes, les avions à réaction et bien d'autres produits3.

On retrouve aussi des terres rares dans les aimants qui sont nécessaires à la production des vibrations de nos smartphones : néodyme, praséodyme, terbium et dysprosium. Quant au tungstène, qui est deux fois plus lourd que l'acier, il sert de poids pour amplifier les vibrations.

L'essentiel du poids en métaux des smartphones n'est pas constitué de terres rares. On trouve par exemple du lithium et du cobalt dans les batteries lithium-ion et une multitude de métaux plus ou moins rares et précieux dans les circuits intégrés et les circuits imprimés. Quelques détails :

  • Un circuit intégré est une plaque de matériau semi-conducteur (généralement du silicium, parfois du germanium) à la surface duquel sont reliés des transistors, petits composants à trois pattes contenant également du matériau semi-conducteur. C'est ce qu'on appelle également une puce. Pour rendre le silicium conducteur d'électricité à certains endroits seulement, il faut le « doper » en y rajoutant des impuretés : du phosphore, du bore, de l'arsenic, de l'antimoine, mais aussi de l'indium ou du gallium. Dans les transistors devant opérer à très haute fréquence, comme ceux employés pour le Wi-Fi, le Bluetooth ou la 4G, le silicium est remplacé par de l'arséniure de gallium ou du silicium-germanium.

  • Avec le lancement de sa génération de 45 nm en 2007, Intel a commencé à utiliser4 du hafnium pour isoler les portes de ses transistors. Ces derniers sont reliés entre eux sur les circuits imprimés par des films de titane et de tungstène. La miniaturisation des puces pousserait les fabricants de semi-conducteurs à remplacer le cuivre, de moins en moins pratique à l'échelle nanométrique, par du cobalt ou du ruthénium.

  • Quant aux circuits imprimés, ce sont des plaques en résine epoxy, souvent de couleur verte, sur lesquelles on soude des composants grâce à des pistes en cuivre. Excellent conducteur électrique, l'or se retrouve aussi dans les circuits imprimés, constituant notamment les fils de liaison entre le silicium et les broches des différents composants. L'argent, lui, est présent dans la plupart des résistances. On retrouve aussi de très petites quantité de palladium dans les circuits imprimés.

  • Enfin, un des composants fréquents que l'on soude sur les circuits imprimés est le condensateur, une petite citerne à énergie électrique. Les condensateurs standards utilisent de l'aluminium, mais ceux-ci sont trop gros pour rentrer dans un smartphone. Pour en fabriquer de très petite taille, on utilise du tantale pour la fabrication de condensateurs dits « gouttes de tantale », ainsi appelés à cause de leur forme aisément reconnaissable. Les propriétés physiques de ce métal (notamment un point de fusion très élevé à 3 016, 85 °C) en font un matériau de choix pour ce type d'application.

Quelles quantités ?

Pour resituer les choses par rapport au poids total d'un smartphone, il faut savoir que, en fonction des modèles :

  • les plastiques et les matières synthétiques représentent 30 à 50 % des matériaux ;
  • le verre et la céramique représentent 10 à 20 % ;
  • les métaux représentent 40 à 60 % des matériaux dans la composition d'un smartphone.

Sur cette quantité de métaux :

  • 80 à 85 % sont des matériaux ferreux et non ferreux comme le cuivre, l'aluminium, le zinc, l'étain, le chrome ou le nickel...
  • 0,5 % sont des métaux précieux : l'or, l'argent, le platine, le palladium...
  • Et 0,1 % de terres rares et métaux spéciaux : europium, yttrium, terbium, gallium, tungstène, indium, etc.

Ce qui représente en pratique pour un smartphone classique :

Composition d'un smartphone classique, source données Orange pour une étude du Sénat5

Globalement et relativement au volume total de métaux produits pour l'ensemble des secteurs les besoins pour les technologies du numérique ne représentent pas une grande proportion, hormis pour certains métaux dont le volume produit est faible par rapport aux grands métaux stratégiques comme le Tantale, l'Indium, le Germanium, certaines terres rares mais qui sont par contre hautement stratégiques.

Pour aller plus loin :

Liliane Dedryver, avec l’aide de Vincent Couric. La consommation de métaux du numérique : un secteur loin d’être dématérialisé [en ligne]. FRANCE STRATÉGIE, Document de travail n°2020-05, 06/2020. Disponible sur le site strategie.gouv [21/06/2021]

World Mining Data. site [21/06/2021]

Le smartphone, pas si « smart » pour l’environnement [en ligne]. ADEME, 09/2020, maj 11/2020. Disponible sur le site de l'ADEME [21/06/2021]

Sources


  1. La plupart de ces informations sont extraites du site de https://www.frandroid.com/comment-faire/comment-fonctionne-la-technologie/613459_a-quoi-servent-les-metaux-rares-dans-nos-smartphones 

  2. Michel Latroche. Les terres rares, et après ?. CNRS Le journal, 05/2019. Disponible sur lejournal.cnrs.fr [21/06/2021] 

  3. Faits sur les éléments des terres rares. Disponible sur www.rncan.gc.ca. Modifié en février 2021. 

  4. Intel's Fundamental Advance in Transistor Design Extends Moore's Law, Computing Performance. SANTA CLARA, Calif., Nov. 11, 2007. Disponible sur intel.com 

  5. https://www.senat.fr/rap/r15-850/r15-8501.html